Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

24/05/2016

« La tombe d’Hanoï », Henri Ansroul, 1er BCCP ; « 5e Promo au rapport », Christian Hager, EETAT, ENSOA ; « Des mots, pour des maux », Jean-Louis Martinez, soldat, poète et artiste.

Extraits publiés avec l’aimable autorisation des auteurs. Droits réservés.

 

Tous les soldats n’ont pas l’aura d’un Marcel Bigeard ; tous les soldats n’ont pas la plume d’un Hélie de Saint-Marc…

intro.jpg

C’est un fait. Mais en quoi cela rendrait leurs témoignages moins intéressants ? Peut-on imaginer un récit de vétéran d’Indo « de trop » ? Un texte rapportant la vie dans l’Ecole des Techniciens de l’Armée Terre à la fin des années 60, n’est-ce pas totalement inédit ? Un militaire ne pourrait-il être, également, artiste et poète ?

C’est l’objectif que nous nous fixons avec ces « milibiblis » : sortir de l’ombre des livres écrits sans la moindre prétention mais avec le cœur, souvent autoédités, donc pouvant souffrir d’un manque de « visibilité ».

Ces ouvrages, éminemment personnels, auraient pu rester dans l’imaginaire de leurs auteurs, être confinés au cercle familial, voire sous la forme d’un manuscrit s’empoussiérant dans un tiroir ; cela aurait été fort dommage : le devoir de mémoire ne s’arrête pas à lire et honorer les hommes  que l’Histoire a eu la bienveillance de conserver dans ses tablettes.

« Tout homme est une exception ».

Hélie de Saint-Marc

 *

 « La tombe d’Hanoï », Henri Ansroul, 1er BCCP, éd. Les Archives Dormantes

Henri.jpg

Henri Ansroul en Indochine, photo famille Ansroul

La première chose que vous faites en arrivant dans une ville, après si longtemps, c’est d’aller voir les filles. Les Indochinoises nous semblaient si belles, quel dépaysement ! Pousse-pousse, chaleur, bruits, klaxon, cette foule qui bouge sans cesse ; on avait envie de se mettre dans le bain tout de suite, sans penser à ce que nous étions venus faire ici.

2319407-750x400.jpg

A chaque fois que je bougeais, je me faisais allumer. Je commençais à me faire du mouron. Puis le sergent nous fît des signes devant : dans les arbres. Et de son arme, il envoya une rafale dans le milieu de ces arbres. Je tirai aussi, deux ou trois autres en ont fait autant. Surprise, étonnement, nous avons vu un paquet de branches tomber. Ces salauds camouflés avec des bouts de branches, nous tiraient dessus. On en a vu descendre trois ou quatre (…) Quelques instants plus tard, j’ai reçu une pierre avec un mot : « on décroche » (…) Les copains qui sont partis avant moi se mettaient en position pour couvrir les autres qui n’avaient pas encore reçu l’ordre. Puis ça y est, c’est mon tour. Les fesses serrées, le trou du cul à zéro, j’attendais le signal.

dedicace.jpg

Beaucoup ont dû croiser Henri Ansroul, humble garagiste breton, sans se douter de son passé de combattant d'Indochine, valeureux commando-para du 1er BCCP. Il a désormais rejoint ses camarades de la tombe d’Hanoï. Le manuscrit qu’il avait pris soin d’écrire aurait pu rester « dans la famille » ; cela aurait été regrettable : sans esbroufe, Henri a un certain talent pour rendre le fracas des combats dans la moiteur indochinoise. Saluons donc l’initiative de ses enfants et petits-enfants qui, avec le soutien de la nouvelle maison d’édition Les Archives dormantes, complète d’une jolie manière la milibibli « Ceux d’Indo ». Disponible chez votre libraire, éventuellement sur commande, ou sur les sites du Net. Par exemple ici. 

Site des éditions Les Archives Dormantes ici.  

Page FaceBook .  

la tombe.jpg

Hanoï, tombe d’André, camarade d’Henri. Photo famille Ansroul

J’ai trouvé une place pour mettre mon hamac. J’étais tellement faible que je restais des heures dedans, bercé par le roulis. Je me disais que maintenant c’était vrai : je rentrais, le bateau ne ferait pas demi-tour. J’avais encore peur, quand même.

***

« 5e Promo au rapport », Christian Hager, EETAT, ENSOA, TheBookEdition

EETAT 1970 (2).jpg

Christian Hager à Issoire.

- Vous n’allez quand même pas prétendre que c’est propre !

- Si, mon Lieutenant.

- Puisque c’est si propre, si je vous donne l’ordre de boire dans les urinoirs. En êtes-vous capable ?

- Non, mon Lieutenant.

- Et pour cause, ils sont dégueulasses !

J’aurais donné cher pour savoir ce qui n’allait pas. J’avais beau scruter les urinoirs à la loupe, je ne voyais rien d’anormal.

- Etes-vous certain d’avoir une bonne vue ? repris le Lieutenant. (…/…)

dédicaceHager.jpg

Cette autobiographie évoque un contexte atypique : celui  de l'Ecole d'Enseignement Technique de l'Armée de Terre, EATAT/EETAT/ENTSOA d'Issoire, AEETAT de Tulle, mais aussi ENSOA de Saint-Maixent, à la fin des années 60. De l’inédit donc. De plus, Christian, dans un style d’une réjouissante simplicité, rend bien l'ambiance de l'époque à travers les yeux d'un jeune-homme : la découverte de la vie militaire, les profs, les camarades, les trains de nuit, les sorties, les nuits blanches place Clichy, les filles... Le résultat est très sympathique et rappellera bien des souvenirs aux aînés, techniciens passés par l'école, mais plus généralement EVAT et appelés.

Et par tous les Saints ? Vive les techniciens !

Disponible auprès de l'auteur ici. 

Page FaceBook de l’auteur .

Image-56 (1).JPG

Ecole des Techniciens de l’Armée de Terre

(…/…) Le Lieutenant n’avait pas l’air d’apprécier nos réponses. Il gardait son calme, mais on le sentait prêt à sortir l’artillerie lourde. Il nous montra un léger dépôt de calcaire sur le pourtour d’un trou d’évacuation. C’était l’objet du délit qui nous valut deux tours de consigne et la présentation de la corvée de lavabos et d’urinoirs en tenue de sortie, chemise blanche, cravate noire et gants blancs, chaque matin à 7h35, pendant deux semaines.

***

« Des mots, pour des maux », Jean-Louis Martinez, autoédité

13266087_1721666231422072_4729692394284984619_n.jpg

J’étais, je suis, et je resterai

ce soldat qui saluait lorsque les couleurs étaient hissées.

J’étais, je suis et je resterai

ce soldat qui frissonnait lorsque la Marseillaise était chantée.

J’étais, je suis et je resterai

ce soldat qui se redressait lorsque le respect lui était donné. 

13055871_1712137619041600_3615339624429553958_o.jpg

Autoportrait

Oui je le resterai, je soutiens et soutiendrai

mes camarades si malmenés.

Je le resterai, afin qu’ils restent ancrés dans le cœur des Français.

Je le resterai, pour que leurs proches soient à tout moment protégés.

Pour les protéger d’un monde individualiste exacerbé.

Qui ne se réveille que quand la mort

Vient à sa porte

Le déranger.

dedicace martinez.jpg

Les dessins et les textes de notre ami Jean-Louis Martinez sont désormais bien connus de la fraternité militaire, étant largement diffusés sur le Net ; mais les avoir sous forme d’un livre, c’est mieux ! "Des mots, pour des maux" est le deuxième opus, dessins-poèmes-textes-coups-de-gueule, tout aussi réussi que le premier, "Soldat protecteur de notre liberté" (abordé dans une milibibli ici). C'est humble, cela parle au cœur, c’est attachant. On aime vraiment beaucoup, tant l’œuvre que l’homme.

Disponible sur le site de Jean-Louis ici. Attention, très peu d’exemplaires encore en stock !

12553034_1675163276072368_133611794125062471_n.jpg

13177993_1718932768362085_8352192647746018307_n.jpg

 

 

 

04/01/2015

« L’espion aux pieds palmés », Bob Maloubier, 11e Choc, Editions du Rocher

Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.

 

 

Il n’est de vie que grande, arrachée à la facilité et à la torpeur.

Il n’est de vie que volontaire, celle qu’on bâtit de ses mains, sans illusion.

Il n’est de vie que confiante : au loin les pessimistes, les dilettantes, ceux qui doutent.

Il n’est de vie que généreuse : la vie, la vie fraternelle qu’attendent, que réclament les hommes.

Maréchal Lyautey.

 

« Je vous aurais bien donné mon livre mais on me les a tous piqués ! A la place, je vous propose du champagne. Ah non, pas au bar ; j’en ai apporté, regardez.  Je n’ai qu’un verre donc nous boirons tous dedans. Cela ne vous gêne pas, n’est-ce-pas ? Blanc ou rosé ? »

Maloubier dédicace.jpg

Nota : la dédicace est un nième trait d’humour de Bob, que nous sommes seuls à pouvoir comprendre…

Quand vous approchez de Bob Maloubier au salon des Ecrivains-Combattants, vous vous demandez comment aborder ce Monsieur qui a tout vu, tout vécu, rencontré le monde entier. Et puis voilà, avec ces quelques mots rapportés plus haut, envolée la timidité naturelle face à une Légende (car Bob en est une, au risque de blesser sa modestie). C’est clair, le bougre a du charme ! Et ce charme, cet humour (toujours bienveillant), cette carrière d’exception, nous les avons retrouvés avec bonheur dans les pages de « L’espion aux pieds palmés », suite de l’autobiographie de Bob, après « Agent secret de Churchill ». A vous d’en juger.

japan_1945_sm.jpg

CNE Maloubier aux Indes en 1945, © collection particulière

A mon retour [du Laos], couturé, paludéen, parasité, décoré, j’étais auréolé de moins de gloire que deux ans auparavant lorsque j’avais libéré Limoges. La défaite des petits hommes jaunes conclue à quinze mille kilomètres d’ici touchait moins les Français que le dernier tirage de la Loterie Nationale ! Après m’avoir serré dans ses bras, mon père m’a dit : « Tu ne possèdes aucun diplôme. Pour tout bagage tu sais sauter en parachute, démolir des ponts et tuer. Ticket non valable dans le civil, mon petit. » 

J’ai donc pris le chemin de la Muette [siège du SDECE , Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage, ancêtre de la DGSE].

 

1946, Création du 11e Bataillon Parachutiste de Choc à Mont-Louis en Cerdagne sur une initiative du COL Fourcaud

saut_e11 (1).jpg

 Saut à Calvi, 1948 - collection Claude Hiroux, 1er et 11e Choc

Le bataillon « spécial » de Fourcaud prend corps, subit un entraînement rude, s’aguerrit, s’épanouit en montagne, en plaine, sur les eaux et s’exerce à la guerre subversive. Nous sommes convoqués à Paris pour les félicitations d’usage, supposons-nous…

« - Vous semez la terreur sur vos Harley Davidson chevauchées, en croupe, par des amazones à moitié nues, m’a-t-on dit. Je n’évoquerai pas le cas du frère du plus célèbre guitariste du monde pourchassant, pistolet au point, l’un d’entre vous qui, semble-t-il, avait fait les yeux doux à sa femme. Et ces parties de 421 au zinc de La Coba, hein ? Vous vous liguez contre un malheureux mari… dont la jolie épouse se morfond. Il perd. Vous le mettez à l’amende : ingurgiter des cocktails de votre invention, explosifs, qui le mettent hors de combat. Pendant ce temps, sa moitié est conviée à une partie de jambe en l’air sous une barque retournée [… ]

- Vous nous avez confié la mission d’établir les bases d’une unité atypique capable de mener une guerre subversive, n’est-ce-pas ? User de moyens classique n’aurait mené à rien. Nous avons adopté des méthodes originales, non conventionnelles… »

 

1951, Fondation des nageurs de combat. Entrainement avec les Britanniques de la SBS

sbs-canoe.jpg

Canoé de la SBS en 1951

Nous slalomons entre deux croiseurs, six cargos et un pétrolier dont les feux surgissent soudain comme des comètes au-dessus de nos têtes ! Nous prenons du retard et embouquons la Hamble River au renversement de la marée. Avancer à contre-reflux, galère ! Nous touchons enfin au point d’atterrage, à marée basse ou presque. Nous puisons dans nos dernières forces pour tracer notre sillon dans les cents mètres de vase qui nous séparent de la terre ferme, tailler à la machette une cache à notre canot dans un buisson de genêts et nous effondrer. A l’aube, deux heures plus tard, le commandant de l’école en personne nous rend visite ! Il vient s’assurer que nous sommes camouflés suivant  les règles et… que nous sommes rasés.

 

1952, Ecole des nageurs de combat

10389072_716512935099823_5112994143461364822_n.jpg

Bob Maloubier homme grenouille, © collection particulière

A quatre-vingts mètres, légère oppression : l’air se fait rare. Je l’aspire à l’économie, par petites bouffées, avaricieusement. Par bonheur je suis un animal à pouls paresseux, à capacité pulmonaire réduite d’autant plus qu’une balle de Lugger, don d’un Feldengendarmes, a oblitéré le lobe de mon poumon droit. Je palme nonchalamment. Coup de pouce à la tige de réserve d’air en me murmurant les dernières paroles murmurées sur l’échafaud par la toute jeune princesse de Lamballe : « Encore une petite minute, Monsieur le bourreau ! ». 

 

De la théorie à la pratique

DSC04226.JPG

Bob en 1952 inaugurant la première planche de navigation originale. © collection particulière

Furieux, l’amiral :

« - Sous prétexte d’une manœuvre « proche de la réalité », un poste de gendarmes maritimes a été sauvagement attaqué par des nageurs masqués ! Six d’entre eux ont été précipités dans un bassin, les autres, estourbis par des grenades au plâtres ont été couverts d’ecchymoses. Je compte sur vous pour identifier les coupables, n’est-ce-pas Capitaine ? »

A l’occasion du prochain briefing, l’œil sévère, après avoir exprimé les griefs de l’amiral à la classe réunie, je conclus : « Je ne doute pas que l’un d’entre vous se fera un devoir de dénoncer les coupables ! ». Le regard reflétant une absolue candeur, quarante lascars aux pieds palmés hochent le chef à l’unisson. Personne ne pouffe. Les plongées répétées, c’est connu, provoquent des amnésies. Or nous plongeons beaucoup...

 

Notre premier mort

DSC04222.JPG

Simulation en conditions réelles de sabotage, équipement opérationnel Pirreli lourd © collection particulière

Ne vous inquiétez pas pour Floch. Vous l’avez sorti de l’eau si vite que sa petite narcose sera sans conséquence. Demain, il aura une grosse migraine, c’est tout ! »

J’ai perdu une belle occasion de me taire…

Au cirque, lorsqu’un trapéziste s’écrase, le spectacle continue ; en escadrille, lorsqu’un avion s’abat, tous les pilotes décollent. Chez nous, lorsqu’un plongeur se noie, nous nous jetons à l’eau. Un remède pour conjurer le sort, dit-on.

 

1956, le Service 29 et la Main Rouge

$_57.JPG

Jo Attia, ancien membre du gang des Tractions de Pierrot-le-fou, enrôlé par Bob comme barbouze pour le compte du SDECE. Dans son bar Le Gavroche. © collection particulière

- Moi tueur à gages ?

- Ah non ! Pas question qu’un officier de l’armée française se fasse prendre la main dans le sac en train de trucider un honorable homme d’affaires étranger… surtout en pays neutre ! Imagine le scandale international, les interventions de l’ONU ! Non, tu driveras, de loin, des opérateurs. Le SR en a dressé une liste : des malfrats condamnés pour une bagatelle et auxquels on offre prime et remise de peine. Pour moins que ça ils tueraient leur vieille maman.

 

1956, Le Caire, malette encombrante devant la Grande Poste, place Tahir

DSC04223.JPG

Base secrète de l’escadrille du Clair de Lune à Persan-Beaumont. A droite Bob. © collection particulière

Lorsque je freine à son approche, d’un geste théâtral, il exhibe la mallette qu’il cachait derrière son dos et la brandie en s’écriant d’une voix hachée :

« - Je n’ai pas pu la laisser… ou plutôt, lorsque je suis sorti, le planton m’a couru après pour me la rendre ! Il l’avait trouvée !

- Mais enfin comment a-t-il fait ? Vous l’aviez bien cachée dans le capharnaüm du couloir, non ? 

- C’est-à-dire… je l’avais laissé sous ma chaise… Enfin, je… »

Il bafouille, mon dynamireto gesticule, puis soudain me balance son fardeau par la fenêtre ouverte de la portière, fait demi-tour et s’éloigne à grands pas, me laissant sur les genoux une machine infernale réglée pour exploser dans une heure au plus. Et au Caire, à l'heure du déjeuner les embouteillages sont inextricables !

 

1960, Françafrique et or noir

DSC04224.JPG

Bob au Nigéria © collection particulière

En 1960, Bob désormais trop « mouillé », Main Rouge oblige, est mis au vert par le SDECE. Alors, élevage de chèvres dans le Bourbonnais ? Il tente bien l’expérience (véridique) mais chassez le naturel, il revient au galop et la suite de sa carrière (purement civile ? hum…) est toute aussi rocambolesque : Forestier au Gabon, il met sur pied la garde personnelle du président M’Ba ; Pour Elf, il prospecte au Nigéria en pleine guerre du Biafra. Cette seconde partie du livre, tout aussi passionnante, nous plonge au cœur de la Françafrique puis de la guerre commerciale pour l’or noir aux pays des mille et une nuits. Golfe Persique, Arabie Saoudite : le marché du pétrole explose et les contrats d'armement avec... 

Quant à « l’affaire » du Rainbow Warrior, il en connaît les dessous.

Voilà. Pas simple de résumer une telle vie et si notre texte peut sembler long, nous avons pourtant sabré allègrement dans tous les évènements rapportés par Bob. Nous espérons vous avoir donné l’envie d’en savoir plus et de lire le livre. Et si l’occasion se présente de rencontrer Bob, foncez…

***

 

10471265_716512938433156_5688707116129838177_n.jpgRobert « Bob » Maloubier nait le 2 février 1923 dans une famille aisée, française mais vivant jusqu’en 1920 aux Etats-Unis. En 1941, il s’enrôle dans l’aviation. Il tisse des liens dès 1942 avec le SOE, les services secrets britanniques, et rejoint Londres en 1943. Il est parachuté en France pour aider les réseaux de la Résistance et participer aux sabotages. En décembre il échappe aux Allemands mais est grièvement blessé (il porte toujours la balle logée dans son poumon). Il retourne à Londres, avant d’être parachuté à nouveau en 44, dans la région de Limoges dont il participe à la libération. En 1945, il intègre la Force 136 des SOE et est parachuté au Laos toujours occupé par les Japonais. A son retour en France, il rejoint le SDECE (actuelle DGSE). Il participe à la fondation du Service Action (11e Bataillon Parachutiste de Choc) en 1947 puis développe l’unité des Nageurs de Combat en 1952. Rappelé au SDECE, il enrôle des « barbouses » dont Jo Attia, ancien du gang des Tractions de Pierrot-le-fou, pour exécuter des contrats contre les financiers et vendeurs d’armes du FLN. Quittant officiellement les services secrets en 1960, il devient forestier au Gabon, y forme la garde personnelle du président M’Ba dans un contexte très Françafrique. En 1962 il est recruté par le pétrolier Shell puis Elf pour prospecter, notamment au Nigéria. Il est à Lagos en 1968 lorsqu’est déclenchée la rébellion du Biafra soutenue en sous-main par la France. Il termine sa carrière professionnelle au Moyen-Orient en étant promu Représentant des Français de l’étranger et Conseiller du commerce extérieur. 

Auteur prolifique,  on lui doit 9 livres,  Robert Maloubier est Chevalier de la Légion d’Honneur, Croix de guerre 1939-1945, Chevalier de la Médaille de la Résistance. Il est décoré des médailles des Evadés, Coloniale agrafe « Extrême-Orient », France-Libre, ainsi que de l’ordre de l'Empire Britannique, 1939-45 Star, France and Germany Star, Distinguished Service Order (DSO) et Member of the British Empire (MBE) et enfin l’un des rares Commandeurs de l’Ordre du Million d’Eléphants du Laos, car décerné par un roi disparu des écrans il y a des lustres. Il a été blessé trois fois.

Projet1.jpg

Nos rencontres avec Bob. En haut le champagne (cf intro). Au milieu Natachenka sous le charme. En bas, Natachenka, jalouse (voir la conclusion) - nous accompagnant, le COL Thierry Jouan, 1er RCP et DGSE, auteur d’Une vie dans l’ombre

MALOUBIER.gif

ISBN-13: 978-2268075129 – prix 21,90 € – format 23x15,2 - 300 pages, cahier-photo

ed.jpg

Aux éditions du Rocher. Site WEB ici

***


dgse.jpg

Hommage

A tous les membres des services secrets morts pour la France. 

Ils n’ont pas reçu les honneurs de la nation, mais nous ne les oublions pas.

Aux blessés.

Avec le salut respectueux du Chasseur et de la Russe-blanc.

 ***

 

Bibliothèque « Bob Maloubier »

bibli.JPG

Scoop : à paraître "Colonel Z"  ou Dansey la Chaussette - chez Albin Michel. 

***

Bob-Maloubier---2.jpg

Bob fait membre de l’Ordre de l’Empire britannique par la Reine Elisabeth II le 5 juin 2014.

« Mon cher Bob, félicitations pour votre décoration, mais Natachenka est un peu jalouse de votre proximité affichée avec la Reine ».

Bob se tournant vers Nat :

«  Rassurez-vous Mademoiselle, Elisabeth n’est qu’une copine ! »

 

 

 

 

 

 

06/01/2014

« DGSE Service Action : Un agent sort de l’ombre », Pierre Martinet, 3e RPIMa, DGSE, Ed. Privé & J’ai Lu.

 

Extraits publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Tous droits réservés.

 

 

Il faut faire des choses audacieuses, même téméraires, quand on y espère un profit matériel ou moral. Mais, ces choses audacieuses une fois décidées, il faut les faire avec le maximum de prudence.

Henry de Montherlant

 

 

En 2005, la parution d’un livre déchaîne les passions. Pensez ! L’autobiographie d’un ancien agent de la DGSE, mêlé qui plus est à une sombre affaire de déstabilisation d’une star du PAF ! « Un agent sort de l’ombre » de Pierre Martinet : une bombe médiatique…  

Dédicace Martinet.jpg 

Il est vrai que le récit de Pierre avait de quoi faire frémir sous les lambris de la République : Para-Colo présent notamment à Beyrouth lors de l’attentat du Drakkar, il a rejoint le *très secret* Service Action de la DGSE. Au fil des pages, il en révèle la sélection et l’entraînement, pour le moins « virils », puis les missions des « espions » français.

Oh, ne vous attendez pas à du 007 ! Sourire émail diamant, smoking, Martini dry et Aston Martin… « Ayez une tête de slip et personne ne vous remarquera.  Passer pour un abruti, c’était le début de la clandestinité ».  L’un des grands intérêts de ce récit, outre le sujet évidemment, réside dans l’humilité de l’auteur. Pierre ne cache rien de ses doutes ni de la fatigue psychologique après tant d’années de vie à la limite de la schizophrénie, qui lui feront finalement quitter le service pour la vie civile… et les ennuis, hélas.

Une autobiographie qui respire l’honnêteté, y compris lorsqu’elle nous emmène dans le marais putride que s’avère être le service Sécurité de Canal+, luttant certes contre le piratage des décodeurs, mais pas que... (et loin s’en faut).

Depuis sa parution, le livre est un succès. Pour preuve sa récente reprise en édition de poche  « J’ai Lu ». Et c’est mérité ! Bien sûr le sujet est porteur, mais « Un agent sort de l’ombre » est aussi un récit clair et bien écrit, forcément autocensuré, mais dans lequel on trouve l’essentiel : « l’essence de la vie d’espion ».

Morceaux choisis :

3e RPIMa, Beyrouth, attentat du Drakkar

Attentat-Drakkar1.jpg

Photo AFP/Jamal Farhat

 « Qui a fait ça, qui a fait ça ? ». La phrase bourdonnait autour de moi comme un insecte. Lancinante, cette question était en train de nous vriller la cervelle. Mais personne ne savait comment y répondre. Y avait-il des survivants ? La structure n’allait-elle pas nous tomber sur la gueule quand on l’escaladerait ? Tout tournait très vite dans ma tête, et pas seulement dans la mienne. Autour de moi, la rage circulait dans les rangs, très vite remplacée par l’accablement devant le tas de béton fumant qui s’étalait sous nos yeux pleins de poussière.

 

2013.10.23 - Attentat du Drakkar à Beyrouth (Liban) - 23 octobre 1983.jpg

Il fallait se déshabiller au plus vite pour éviter les infections. A cause des risques, les médecins avaient donné l’ordre à tous ceux qui avaient travaillé sur la zone de brûler leur treillis. A la queue leu leu, on a porté nos fringues imprégnées de la mort de nos copains (…) Nous regardions ce feu de camp improvisé tout en nous observant. On n’était pas beaux à voir, mais on se sentait profondément vivants. J’ai eu un petit frisson. Je voyais que quelque chose était en train de s’envoler dans les volutes noires. Sans doute un morceau de notre naïveté sur le monde. Notre innocence s’était barrée, écrasée à quelques kilomètres de là sous des tonnes de béton.

 

N’Djamedna, Tchad, opération Epervier

027_Tchad_J.Nicolas_1980.jpg

Forces Spéciales, Tchad. Photo José Nicolas

Je les ai vus arriver. Deux commandos d’une trentaine d’hommes avec les cheveux mi- longs, aucune trace de la tenue réglementaire ni d’arme apparente. Juste leurs gueules ridées qui indiquaient qu’ils étaient restés longtemps sous le soleil. Je savais qu’ils rentraient de là-haut et je les enviais. Eux, au moins, allaient au combat. C’était la deuxième fois que je croisais les hommes du Service Action, et je pensais que, décidément, si je voulais de l’action, c’était avec eux qu’il fallait être.

 

Service Action de la DGSE, Camp de Cercottes, sélection et entraînement

Nous vivions les uns sur les autres, sans lumière du jour, comme des souris de laboratoire. La distribution des corvées donnait lieu à des engueulades et c’était voulu par les instructeurs. Principe du rat en cage, il fallait tester la résistance psychologique des candidats. Ça marchait (…) Certains se renfermaient sur eux-mêmes, d’autres se plaignaient, d’autres encore se révélaient être des leaders.  En fait il y avait ceux qui subissaient la situation et ceux qui l’affrontaient (…) L’isolement était en train de nous façonner en profondeur, de nous sculpter la cervelle définitivement.

3.jpg

« D’abord la glotte. Vous lui écrasez d’un coup sec, soit avec le tranchant de la main, soit avec un coup de poing. Si vous tapez très fort, ça broie les cartilages et il ne peut plus respirer. Ensuite, le nez. Un coup sec avec la paume de la main de bas en haut. Tout le corps doit appuyer votre coup comme si vous vouliez lui rentrer le cartilage du nez dans le cerveau. Pour le plexus, c’est aussi simple ! Vous tapez très fort comme un piston. L’onde de choc lui coupera net la respiration. Ca fait très mal et ça vous casse en deux votre adversaire. Ensuite, pour les filles, il y a le traditionnel coup de pied dans les couilles. ».

-

Léon [notre instructeur] était un musicien du calibre et il avait sa propre partition. Elle s’appelait « ploum-ploum… ploum ! » « Quand vous tirez, n’oubliez jamais : deux balles dans le buffet… ploum-ploum et on finit par un balle dans la tête… ploum ! ».

 

En mission avec le service Action de la DGSE

services-secrets-barbouzeries-pirates-dst-dgse-11.jpg

Avoir une nouvelle identité était une chose. Se créer la légende qui allait avec était indispensable. Un agent doit connaître par cœur les adresses des cafés du coin, savoir si le patron est moustachu, chauve, ou hirsute et mal rasé. Le médecin généraliste que l’on va voir et nous prescrit des antibiotiques au moindre rhume, les stations de métro les plus proches… tous ces détails qui font que votre légende est blindée et que l’on vous croit lorsque vous en parlez. Votre légende, c’est votre gilet pare-balles. Plus elle est épaisse plus on mettra de temps à vous percer à jour. J’étais entré dans la phase schizophrène de l’agent.

article-0-155B1265000005DC-446_306x423.jpg

Photo P.A.

Je pensais en regardant le visage barbu qu’il valait mieux qu’il change de vie s’il voulait voir grandir ses enfants, parce que pour lui le sablier venait de se retourner. Adrien dit : « Les préops ont déjà équipé la ville dans laquelle vous allez opérer. - C’est où ? - Londres. Abou Walid s’y est installé depuis peu. En fait, l’Etat-Major le soupçonne fortement de préparer, avec son groupe de joyeux comploteurs, des attentats pendant la coupe du monde de football. La première rencontre aura lieu dans quelques mois au stade de France, à Saint-Denis. Inutile de vous dire que c’est même pas la peine d’y penser. On ne revivra pas les attentats du RER. ».

Capture 2.JPG

Après avoir effectué notre itinéraire de sécurité, on est revenus tous les deux au point de départ. Il n’y avait plus personne. Je me suis dit que Caroline commençais à voir des « rats bleus » partout. Dans le jargon de la maison, cela voulait dire que l’agent rentrait dans une crise paranoïa aiguë, un peu comme les alcooliques. A la différence qu’il mettait en danger toute la mission et son équipe. Deux minutes plus tard, Caroline a recommencé. Qu’elle ne sentait pas le truc, qu’elle était sûre qu’on était suivi et que, de toute façon, on s’était fait repérer par les services suisses et qu’on allait finir comme les agents du Mossad, quelques mois auparavant. Je lui ai demandé de fermer sa gueule, puis on a traversé la rue pour se diriger vers cette putain de boîte aux lettres. On était en retard sur l’horaire de livraison et je voyais déjà ceux d’en face se demander pourquoi e la panique monter. Puis j’ai regardé Caroline. C’était la première fois que je lui parlais comme cela. Trop de pression, trop de missions en préparation, trop de fatigue accumulée. Beaucoup d’agents traversaient ce genre de crise après un certain temps sur le terrain, n’arrivant plus à gérer les trop grandes quantités de stress occasionnées.

Capture 1.JPG

« Personnellement, j’en ai un peu marre de tourner autour d’Abou Walid. Je pisse dans ses chiottes, je bouffe dans son assiette, je dors presque dans son lit. J’ai quasiment remplacé son ombre. Il ne fait pas un mètre dans la rie sans que je sois dans ses babouches ou sur ses talons. Si ce mec  est un ennemi de la République ; d’un coup de cutter, je luis ouvre la carotide et on n’en parle plus. Ça fera faire des économies aux contribuables. Il passe certains soirs par la même petite rue… »

Adrien et les autres ont sursauté et j’ai bien compris, au regard qu’Adrien m’a lancé, qu’il n’aurait jamais dû me donner la parole.

h_4_ill_650001_france-espionnage-editio-70.jpg

Quelque chose s’était cassée sans que je m’en rende compte. Dix-sept ans à servir les intérêts du pays. De Beyrouth au Tchad, de Centrafrique à la Nouvelle-Calédonie, les souvenirs remontaient comme des bulles. Surtout, je sentais mon corps me dire que c’était bon, qu’on pouvait s’arrêter. Après trois mille sauts, mes deux genoux étaient fracassés et l’arthrose lombaire qui se pointait les jours de pluie, je commençais à ressentir l’usure de ne pas m’être ménagé une seule seconde. Trop d’adrénaline tue l’adrénaline (…) On ne vivait pas indéfiniment loin de la lumière dans une ambiance poisseuse, de méfiance, de suspicion et de parano sans avoir le métabolisme modifié en profondeur.

Je me suis dit qu’il était temps d’apprendre à écrire des CV. Sauf que je me demandais bien ce qu’on pouvait faire en sortant du Service.

Cher Monsieur,

Je sais espionner, tuer à mains nues, sauter en parachute et faire péter des chars à distance. Engagez-moi, je serai un plus pour votre société.

 

Canal+

Les-ennemis-des-Etats-Unis-Guignols-de-lInfo.jpg

[en 2001, usé tant physiquement que psychologiquement, Pierre quitte la DGSE pour intégrer le service Sécurité de Canal+ où il espère vivre une fin de carrière dans la sérénité. Hélas la chaîne est en pleine tourmente, luttes d’influence entre businessmen et stars du PAF, magouilles et tutti quanti]

Je suis rentré à Orléans [où est basé le Service Action de la DGSE]. J’avais respiré en m’éloignant de cette ville et du Service. J’y avais passé dix ans. Maintenant, j’y retournais pour fuir le piège dans lequel je m’enfonçais tous les jours un peu plus. Je me rappelais de ma vie parallèle d’avant. Ce que l’on faisait avait un sens, les enjeux nous dépassaient tous, nous étions des soldats. J’avais été fier des missions. J’avais même trouvé que l’on n’en faisait pas assez. J’avais cru que dans le civil ce serait différent. Cela n’avait pas été le cas. C’était bien pire. Des histoires crapoteuses de télé et de gros sous, des histoires de flics véreux, il y avait mieux en guise de vraie vie.

 

L’adieu aux armes

PM 01 2005(JOEL SAGET  AFP).jpg

Je me suis assis, j’ai commandé un café et j’ai compté les espions de bureau, une bonne poignée à vue d’œil. Je me suis dit que ma carrière s’arrêtait là, sous leurs yeux, que je pouvais tourner la page, que j’assumais ma vie, que j’en étais fier mais qu’elle n’était pas finie.

***

Pierre est allé au-devant des ennuis, en se livrant ainsi. Mais il est évident que l’écriture de ce récit a été un exutoire l’aidant à se reconstruire psychologiquement. Et c’est très bien ainsi.

Remercions le aussi, non pas pour avoir sorti de l’ombre, mais pour avoir mis un rai de lumière sur ces hommes et ces femmes des services secrets, qui prennent au nom de la France des risques énormes, parfois jusqu’à la mort, sans que cette France ne soit en mesure de reconnaître officiellement leurs sacrifices. Pas de cérémonie aux Invalides pour eux. « Un agent sort de l’ombre » leur rend un hommage mérité.

IMG_2144.jpg 

Nous avons rencontré Pierre à Saint-Cyr en 2013, et avons échangé régulièrement avec lui depuis.

Il va très bien…

***

1304739-1715504.jpgNé en 1964, fils et petit-fils de militaire, Pierre Martinet s’engage en 1983 au 3e Régiment Parachutiste d’Infanterie de Marine. Il est déployé notamment  au Liban et au Tchad. Alors Sergent-Chef, il postule au Service Action de la DGSE. Il y « officie » sous le pseudonyme de Florent. En 2001 il intègre le Service Sécurité de Canal+, entre lutte contre les réseaux de piratage et sombre histoire d’espionnage interne.

Pierre mène désormais une carrière de consultant dans le domaine de la sécurité et d’auteur. Outre « Un agent sort de l’ombre », on lui doit « De l'ombre à la lumière » (Ed. Privé), « Cellule Delta » (Flammarion) et « Opération Sabre d'Allah » (Ed. du Rocher),  récits romancés plus que des romans. Il dirige également la collection « Service Action » des Editions du Rocher dans laquelle figure « L’espion aux pieds palmés » de Bob Maloubier.

« Un agent sort de l’ombre » a été écrit en collaboration avec Philippe Lobjois, journaliste, auteur de plusieurs livres et documentaires sur l'Afghanistan, l'ex-Yougoslavie et l'affaire Ingrid Betancourt. 

***

41GjGcT6fFL.jpg

Prix (J’ai Lu) 7,70€ - ISBN 978-2290028698 - Format 17,8 x 11 - 381 pages

Aux éditions Privé & J’ai Lu

« Un agent sort de l’ombre » et les autres livres de Pierre Martinet se trouvent très facilement dans toutes les bonnes libraires sur les sites du Net. Par exemple ici. 

Martinet livres.jpg

***

 

drakkar_1.jpg

Hommage

Aux 58 Chasseurs-Parachutistes des 1er et 9e RCP morts pour la France dans l’attentat du Drakkar

Capitaines Jacky Thomas et Guy Ospital, Lieutenant Antoine Dejean de La Bâtie, Sous-Lieutenant Alain Rigaud,  Adjudants Antoine Bagnis et Michel Moretto, Sergents Christian Dalleau, Vincent Daube, Jean-Pierre Lebris, Yves Longle et Gilles Ollivier, Caporaux-Chefs Djamel Bensaidane, Laurent Beriot Laurent, Vincent Carrara, Louis Duthilleul, Xavier Grelier, Olivier Loitron, Franck Margot, Patrice Seria et, Hervé Vieille, Caporaux Patrice Girardeau, Jacques Hau, Laurent Jacquet, Patrick Lamothe, Dominique Lepretre, Olivier Leroux,Franck Muzeau et Laurent Thorel, Parachutistes de 1ère classe Guy Gasseau , Remy Gautret, François Julio, Gilles Pradier, Patrick Tari et Sylvestre Théophile, Parachutistes Yannick Bachelerie, Richard Bardine , Franck Caland, Jean-François Chaise, Jean Corvellec, Jean-Yves Delaitre, Thierry Deparis, Thierry Di-Masso, Hervé Durand, Romuald Guillemet, Jacques Kordec, Victor Lastella, Christian Ledru, Patrick Levaast, Hervé Leverger, Jean-Pierre Meyer, Pascal Porte, Philippe Potencier, François Raoux, Raymond Renaud, Thierry Renou, Bernard Righi, Denis Schmitt et Jean Sendra.

Aux 241 soldats américains morts dans le précédent attentat du 23 octobre 1983

Aux blessés.

 

1816318_3_e0ea_un-commando-de-la-direction-generale-de-la_f40ce163f4b6d4bad4722e8ddfb57921.jpg 

Hommage

Aux membres de la DGSE morts, souvent anonymement, pour la France.

Aux blessés.

96604-une-dgse-logo_1143.jpg

 

 

 

 

 

 

12/11/2013

« E.V.3 - Engagé Volontaire 3 ans », MDL Patrick Camedescasse, artilleur. Ed. Catybou

 

A la mémoire de mon père Francis Broquet, E.V.3, Maréchal des Logis au 421e Régiment d’Artillerie Anti-Aérienne.

 

 

« - Eh bien, Adjudant, qu’avons-nous comme recrues ?

- Oh mon Capitaine, nous en avons de tous les états : des avocats, des savants, des dessinateurs…

- Un tas de feignants et de propre à rien, quoi ! » 

Légende d'une carte-postale humoristique, vers 1900.

 

 

"11 avril 1970, quartier Pajol, Montbéliard. Je suis civil, un sac sur l’épaule. Je quitte l’armée en passant devant le poste de garde. Je sais que je vais le faire… C’est sûr. C’est certain…

Depuis longtemps déjà, dans ma tête, j’avais fait et refait cette sortie. Tout est programmé. Un « bras d’honneur », immense, grandiose, éléphantesque, « mammouthesque », pour extérioriser ma déception de ces trois années en kaki.

Quelque pas encore. Ça y est. J’y suis. Je vais le faire. Je vais le faire…"

Camedescasse.jpg

Flashback : nous sommes en 1967. Les cheveux des garçons s’allongent et les jupes des filles raccourcissent. Un Bordelais de 18 ans, Patrick Camedescasse, n’est pas trop fan de l’école. Sa voie semble toute tracée : ouvrier, artisan… mais avant cela, il faut passer une étape incontournable pour un jeune homme, cheveux longs ou pas : le service national. Plutôt que de « glandouiller » en attendant l’appel, Patrick se dit qu’après tout, l’engagement de 3 ans, pourquoi pas…

En dehors des dîners de famille, rares sont ceux qui ont abordé leur service militaire. Alors remercions Catherine, femme de Patrick et son éditrice, d’avoir soutenu la démarche d’écriture de son mari. On peut imaginer les conversations du couple autour de « Mais cela n’intéressera personne !». Et bien si Patrick, cela intéresse. Cela intéresse même beaucoup !

Heureusement donc, Patrick s’est lancé et nous livre avec « E.V.3 » le bien sympathique récit de ses 3 ans d’artilleur dans un régiment d’appelés. Un livre qui se lit avec le sourire aux lèvres, mais qui générera, à n’en point douter, un peu de nostalgie chez les plus anciens d’entre vous.  Ceux-là même qui, un matin, ont ouvert fébrilement une enveloppe contenant  une feuille de route, mentionnant  une date, un régiment, une caserne dans une petite ville de France ou d’Allemagne…

Prenons cette route avec Patrick, pour une sacrée aventure … Cela en était vraiment une.

photo identit+® pat 300 dpi051.jpg

A cette époque, Antoine et ses élucubrations faisait des adeptes de cheveux longs (…) Aussi, quel plaisir pour un coiffeur appelé ! Quelques passages de tondeuse et notre chevelure gît aux pieds de l’artiste. S’en suivent des quolibets du style : « J’espère que Monsieur est satisfait, il pourra revenir quand il voudra ! » (…) J’ai alors l’impression, en regardant mes camarades, de me reconnaître. Nous sommes tous semblables.

sur la murette 300 dpi044.jpg

La première revue qui nous tombe dessus se nomme « revue du slip sur l’homme ». Imaginez nos têtes lorsque, devant nos lits, en pleine journée, cet ordre nous arrive. Chacun à son tour, nous baissons nos pantalons (…). A l’époque, dans notre paquetage, nos slips sont blancs, mais là, surprise… Il y en a des blancs, des gris, des colorés devant, des colorés derrière, des jaunes bizarres (…) et comble du raffinement, un collègue sans slip. (…) Les ventes de « Génie sans bouillir » montent en flèche. Maintenant, n’ayant pas de récipient adéquat, nous faisons tremper notre lessive dans nos casques lourds…

bureau013.jpg 

Réveil brutal en plein sommeil quand un sous-officier zélé nous fait lever. Il en choisit un au hasard et lui ordonne d’ouvrir son armoire. En principe, nous avons le devoir de ranger correctement nos effets. Tout « au carré », les chemises d’un côté, les treillis de l’autre selon un plan que l’on doit respecter (…) Le plus bordélique de la chambre est désigné. Nous nous attendons au pire et le pire arrive : le sous-officier ouvre la porte de l’armoire et tout le paquetage tombe sur ses pieds.  (…) Les vêtements sont alors jetés par la fenêtre. Tout y passe, treillis, chemises, capotes, slips, chaussettes, chaussures, casque, ceinturon, béret… Fier de son travail, notre homme se retire. Nous sommes écroulés de rire et, pour ma part, j’ai cette image à jamais marquée : La vue du canonnier H déambulant à poil entre le rez-de-chaussée et le deuxième étage pour récupérer son paquetage.

Hiver dans le Doubs f+®v 1970 .JPG

Le samedi je passe l’appel à minuit et constate que tout le monde est bien présent. Pourtant, vers 2 heures du matin le sous-officier de service désire effectuer un deuxième appel (…) Nous voici donc partis à la recherche de l’éventuel absent qui aurait pu faire le mur. Pour les quatre premières chambres, tout est pour le mieux, mais je sens mon collègue bien réservé sur les chiffres. Entre les permissionnaires, les malades, les gens de garde et les présents, les totaux sont bien difficiles à établir.  Nous entrons dans la dernière pièce et là, après calcul et recalcule  il nous manque deux canonniers, bien présents au dernier appel. Le chef de chambre pense nous embrouiller et nous explique qu’ils sont certainement aux toilettes. Personnellement, je n’y crois guère, mais le sous-officier de permanence, crédule, fonce comme un fou (…) A peine a-t-il tourné les talons que deux canonniers de la chambre d’en face se faufilent et prennent place dans les lits des deux absents.

Je ferme les yeux et dis à mon collègue de contre-appel que le compte est bon et lui explique que je me suis sûrement trompé dans mon premier calcul. Méfiant, il recompte et tombe sur le bon total…

Image scann+®e 014.jpg

Les obusiers sont chargés et prêts à cracher, quand soudain l’officier de tir hurle « Halte au feu ! Halte au feu !». Surpris, nous nous exécutons en donnant ordre à nos tireurs de lâcher le cordon de mise à feu. Nous patientons et cherchons des informations sur ce brusque contre ordre. « Des civils sont entrés dans le périmètre de tir et malgré la demande expresse de notre Colonel, ils refusent de déguerpir » nous explique notre Lieutenant. (…) De nouveaux renseignements nous parviennent. La Gendarmerie de Mourmelon, prévenue, a détaché quelques éléments de la brigade afin d’évacuer ces perturbateurs. Raison de leur intrusion : le ramassage d’escargots…

Image scann+®e 017.jpg

Un besoin naturel mais pressant me signifie que je vais devoir faire connaissance avec les feuillées du régiment. Je redoute cet instant car j’aime bien mon intimité, espérant une grande solitude. J’accélère le pas, j’entre, personne. Tranquillement je me mets en position de trône et commence à faire ce que je dois.

Et c’est alors que l’impensable se produit, la porte faite de branches et branchages s’ouvre et là, devant moi, mon Capitaine !

« Ah ! Camedescasse, bonjour ! Vous permettez que je vous accompagne ? »

« Euh… Oui mon Capitaine … » 

Et le voilà qui prend place à mes côtés et commence sans complexe à déféquer, tout en me demandant si mes nouvelles fonctions me plaisaient.

« Euh… Oui mon Capitaine… »

Un bruit typique, mais qui n’a rien d’un coup de canon, rend inaudible ma réponse. Et il commence à me parler de la météo, de Nevers, des escargots que l’on peut ramasser dans le coin (…) et me quitte en me souhaitant une bonne journée.

Image scann+®e 006.jpg

« Disons-le sans faux-fuyant : cette période s’est révélée formidable d’humanité, d’échanges, de camaraderie. Dans ce brassage hétéroclite de 16 mois, creuset de solidarité et de sociabilité, sont parfois nées des amitiés profondes et durables… »

Patrick Surel, camarade de service de Patrick Camedescasse.

 

quille 300 dpi050.jpg

La quille (fin du Service)

Jeunes-gens, n’avez-vous jamais « subi », lors d’un long dîner, les souvenirs de Service du grand-père, du papa, du tonton ? Histoires rabâchées, écoutées poliment, mais qui doivent vous « saouler » un peu. Eh bien la prochaine fois, faites un effort : regardez avec attention ce grand-père, ce papa ou ce tonton, lorsqu’il en aura fini avec sa tirade débutée par « et alors là, le Pitaine… ».  Attachez-vous à son regard. N’y voyez-vous pas l’étincelle de l’émotion ?  Nostalgie de ses 20 ans ? Sans doute un peu, mais cette étincelle existe-t-elle, quand il évoque un souvenir de lycée, de son premier job ? Non, n’est-ce pas. Cela devrait vous interpeller.

Avec la disparition du Service, vous avez raté quelque chose, jeunes-gens, vous avez vraiment raté quelque chose… 

Quant à la France, quelle bêtise elle a fait en supprimant cet outil essentiel de cohésion nationale. Quelle gravissime bêtise.

 

Bravo et merci à Patrick pour cet E.V.3 que nous recommandons sans réserve, dans l’espoir que d’autres appelés et volontaires service long se lanceront à leur tour : il y a tant à raconter.

 

3413_158694030999762_373477051_n.jpg

Prix : 19€ - ISBN 9782953314151 - format 15,5x24 - 208 pages, nombreuses illustrations en couleur et N&B.

 

top1.jpg

Aux éditions Catybou

Pour commander le livre, voir ici.

Cadeau pour vous, lecteurs : En indiquant le code EV3LAPLUME, les frais de port en France métropolitaine sont offerts.

Page FaceBook du livre E.V.3 ici

 

 ***

 

Patrick Camedescasse d+®dicace son livre.JPGEn 1967, devançant l’appel, Patrick Camedescasse s’engage pour 3 ans. Il effectue ses classes au 33e Régiment d’Artillerie de Poitiers. Il rejoint à l’issue l’ENSOA de Saint-Maixent dont il sort Maréchal des Logis. Après son instruction à l’Ecole d’Application de l’Artillerie à Châlons-en-Champagne, il est affecté au 1er RA de Nevers, puis Montbéliard. Il est libéré en 1970. Patrick est marié à Catherine, par ailleurs son éditrice, et père de deux garçons, Christophe qui effectue son service national au 11e Régiment de Cuirassiers, et Jérôme qui y échappera, le service vivant ses dernières années…

 

***

 

SN.JPG

Hommage

A tous les appelés, volontaires service long, engagés volontaires, morts pour la France, morts en service commandé,

avec une pensée particulière pour les appelés du 1er RCP, morts à Beyrouth dans l’attentat du Drakkar,

Aux blessés.

 

Avec le salut fraternel du Chasseur et de la Russe-blanc

 

Béret_(Insigne_d'artillerie).JPG

Armés de nos vingt printemps verts,

Artilleurs mes frères,

Aux souvenirs buvons un verre !

 

 

devant maison021.jpg

11 avril 1970, quartier Pajol, Montbéliard. Je suis civil, un sac sur l’épaule. Je quitte l’armée en passant devant le poste de garde. Je sais que je vais le faire… C’est sûr. C’est certain…

Depuis longtemps déjà, dans ma tête, j’avais fait et refait cette sortie. Tout est programmé. Un « bras d’honneur », immense, grandiose, éléphantesque, « mammouthesque », pour extérioriser ma déception de ces trois années en kaki.

Quelque pas encore. Ca y est. J’y suis. Je vais le faire. Je vais le faire…

Je ne le fais pas.

Je me retrouve dehors. La sentinelle ? Je ne la regarde même pas. Je cours. Je pleure. De joie ? D’émotion ?

 

 

 

 

 

 

 

Récit biographique, engagé volontaire, 33e RA, ENSOA, EAA, 1er RA