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04/09/2015

Marin sur les fleuves d'Indo & pilote de Corsair en Algérie, chef des FS au Kosovo, Commissaire des armées en CdI, valeureux Poilus et déroute djihadiste au Mali

 

Poursuivons la visite de notre bibliothèque militaire, entamée ici

Cette fois-ci, nous revivons les combats d’un grand-ancien d’Indochine et d’Algérie. Nous accompagnons au Kosovo le chef des Forces Spéciales françaises et en Côte d’Ivoire un Commissaire des Armées. Nous visitons la base de Nancy-Ochey, tanière des Muds alias Mirage 2000D. Nous nous posons des questions sur nos valeureux Poilus et nous concluons, grâce à l'assistant militaire du chef des opérations terrestres de Serval, avec la brillante victoire de nos soldats sur les djihadistes au Mali !

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« De Saïgon à Alger », LV Bernard Bachelot, Dinassaut 6, 14F, 12F

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LCM en patrouille fluviale, Indochine

Certains hommes se sont finalement endormis couchés les uns sur les autres. A la surface du fleuve, l’eau phosphorescente scintille. Les remous font danser le reflet des étoiles et les lucioles transforment un palmier en arbre de Noël. Un souffle d’air fait vibrer le feuillage. Ce frémissement provoque un malaise. Et toujours le croassement lancinant des crapauds-buffles. Les guetteurs viets, tapis dans ces branchages, doivent écouter le passage du convoi. Les oreilles se tendent. Le bruit sourd d’un tam-tam. Est-ce la peur ? Non, le rythme est plus net maintenant : les Viets donnent l’alerte. Deux coups brefs, un coup sourd. Pam, pam, poum… pam, pam, poum… Les doigts se crispent sur les armes.

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Corsair de la 14F partant en mission depuis la base de Telergma dans le Constantinois, Algérie. Photo Bachelot

Le napalm s’enflamme à une vingtaine de mètres au-dessus de la grotte. Bien décidé à réussir ma deuxième attaque, je garde une ligne de vol parfaitement horizontale et attends « le plus tard possible ». J’appuie sur le bouton et tire violemment sur le manche. Le sommet de la falaise apparaît au-dessus du nez de mon appareil, trop haute me semble-t-il pour être franchie. Trop près de la montagne, je ne peux dégager en virage. En un mouvement reflexe, je pousse à fond la manette de gaz et accentue fortement ma pression sur le manche. Ma cellule se met à vibrer violemment, je suis à la limite du décrochage. La falaise fonce sur moi.

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L’exode, Alger, 1962.

Un choc, une blessure. En cet instant ma vie bascule. Un monde – le mien – s’effondre. Des valeurs essentielles auxquelles j’avais appris à croire et à être fidèle – patriotisme, honneur, parole donnée… - ont toutes été violées. Ne sont-elles plus désormais respectables ? Terrible déception qu’accompagne un sentiment de révolte qui, des années durant, me rongera et qui, 45 ans après, reste encore vivace.

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« De Saïgon à Alger » par le Lieutenant de Vaisseau Bernard Bachelot, EN48. Un monsieur discret, rencontré lors du salon des écrivains-combattants 2013, et pourtant un grand ancien : il a combattu de 51 à 53 sur les fleuves de Cochinchine, au sein de la Dinassaut 6, Flottille Amphibie Indochine Sud, avant de devenir pilote de l'Aéronavale, flottilles 14F puis 12F dont il prend le commandement. Formé aux Etats-Unis, c'est aux commandes de son Corsair qu'il intervient lors de la campagne de Suez puis de la Guerre d'Algérie - époque déchirante pour lui, Bernard étant pied-noir, amené à bombarder sa propre maison de famille… L'issue du conflit sonnera d'ailleurs le glas de son engagement militaire. Très beau récit.

Aux éditions L'Harmattan, disponible ici.

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Avec le LV Bernard Bachelot au Salon des Ecrivains-Combattants 2013

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 « L’Europe est morte à Pristina », COL Jacques Hogard, Légionnaire

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Miliciens de l’UÇK [milice indépendantiste Albano-Kosovare]

Une embuscade vient d’être déclenchée par l’UÇK sur un convoi de civils serbes, deux cents tracteurs emportant hommes, femmes et enfants, sur la route reliant Pec à Mitrovica. Je fais effectuer une reconnaissance par un hélicoptère armé qui me rend compte de la position des éléments de l’UÇK. Je lui demande alors de tirer quelques rafales de semonce afin de les contraindre à décrocher et cesser cette agression inqualifiable sur des civils armés. 

Quelques minutes plus tard, je suis, à ma très grande surprise, appelé à la radio par le Général britannique Mason qui m’enjoint de faire cesser les tirs contre ses SAS ! Je réalise alors que les éléments de l’UÇK qui se livrent à cette embuscade (…) sont encadrés – au minimum accompagnés- par mes « frères d’armes » des Forces Spéciales britanniques…

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« L’Europe est morte à Pristina » par le COL Jacques Hogard, Légionnaire, commandant le groupement interarmées des Forces Spéciales françaises au Kosovo, GIFS « Grakaniko », vétéran du Rwanda dont il a tiré un premier récit « Les larmes de l’honneur », que nous avons abordé ici

Dire que le conflit au Kosovo a été « compliqué » est un euphémisme, l’implication occidentale pouvant (devant) faire débat. Jacques ne s’en prive pas, battant en brèche certains choix militaro-politiques Otaniens [il démissionnera d’ailleurs de l’Armée après cette OPEX]. L’Histoire jugera. En attendant, nous ne pouvons qu’espérer que les communautés serbe et albanaise trouvent le chemin d’une coexistence pacifique… Et souvenons-nous des neuf soldats français morts au Kosovo, entre 2000 et 2009. Hommage à eux et aux blessés.

Aux éditions Hugo Doc. A commander chez votre libraire ou sur le Net.

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Avec le COL Jacques Hogard, notamment après sa conférence sur le Kosovo à l’IDC en mai 2014

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« La nuit africaine », Commissaire des armées (CNE) Julien Eche

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La Vierge aux larmes de sang, œuvre de Sandre Wambeke inspirée du livre de Julien Eche

Les Français nous prennent pour des gosses souriants : l'Afrique heureuse, qu'ils disent. Un peu comme si nous n'étions pas assez civilisés pour avoir l'air grave. C'est qu'ici, jeune homme, nous savons dès la naissance que nous sommes mortels comme tous les hommes, et que la finalité, c'est la cendre. Alors la vie doit être heureuse, joyeuse, rythmée et agréable. 

Vous autres Blancs, imaginez repousser sans cesse la mort, elle entre par trop en considération dans vos calculs ; il n'y a pour vous que l'épargne d'une vie, la position sociale, les chimères que votre société a inventé pour plus de richesse qu'il n'est physiquement possible (...) Alors vivez, oui, vivez ! Enchantez la vie des autres et faites en sorte d'être heureux, quoi qu'il vous arrive; Cela n'a rien de primitif. C'est au contraire la plus grande des sagesses.

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« La nuit africaine » par le Commissaire des Armées (CNE) Julien Eche est un récit romancé, inspiré de son déploiement en Côte d'Ivoire peu après la guerre civile : Un jeune officier part à la tête d'une petite unité pour montrer la présence française dans la brousse. Un parcours initiatique, vu initialement par le narrateur comme une aventure "à la capitaine Binger" (qui rallia Dakar à Kong à la fin du XIX°), mais qui, au gré des rencontres et évènements, ira bien au-delà de l'imagerie exotique véhiculée par les affiches ventant la Coloniale dans les années 30. Une belle histoire, bien menée et profonde. Pas seulement une autre vision de l'Afrique, une autre vision du soldat aussi...

Aux éditions L'Harmattan. Disponilbe ici.

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Avec le Commissaire des Armées Julien Eche

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« Dans le repaire du Mirage 2000D – Nancy-Ochey », Alexandre Paringaux, photographe

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Ses équipages sillonnent les cieux des Balkans, de l'Afrique, de l'Asie centrale et de l'Afghanistan. Cette omniprésence repose certes sur des matériels performants, en perpétuelle amélioration, permettant de répondre aux défis technologiques d'engagement toujours plus exigeants. Mais elle repose surtout sur les femmes et les hommes de la base aérienne de Nancy-Ochey qui permettent de répondre en permanence aux sollicitations opérationnelles. Quelle que soit leur spécialité, toutes et tous sont des rouages indispensables dans la performance de la BA 133. Dévoués et pugnaces, ils démontrent au quotidien un engagement sans faille, en dépit d'un environnement difficile. Les opérations menées au Kosovo, en République Démocratique du Congo, en Afghanistan, en Lybie ou encore au Mali attestent de leur engagement militaire et de leur abnégation.

Colonel Louis Péna, Commandant de la Base aérienne 133 « Commandant Henry Jeandet »

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« Dans le repaire du Mirage 2000D – Nancy-Ochey » n’est qu’un exemple parmi toute une série de beaux livres publiés par le photographe Alexandre Paringaux et Frédéric Lert, journaliste aéro de référence. On trouve en effet, dans la même collection, des ouvrages dédiés à ER 2/33 « Savoie », EC 3/3 « Ardennes », la Patrouille de France, les bases de Saint-Dizier, Mont-de-Marsan, Salon-de-Provence, les Forces Aériennes Stratégiques, le porte-avions Foch… Des livres-albums où l’on retrouve évidemment de superbes photos d’avions, mais aussi les hommes qui les font voler, les arment et les entretiennent ; ceux qui font fonctionner la base ; ceux qui la protègent. L’ensemble est visuellement remarquable, accompagné d’un texte fouillé et de nombreuses interviews. A chaque fois une petite bible, tant le sujet est traité avec exhaustivité. Attention, les tirages s’épuisent vite…

Aux éditions Zéphir. Disponible ici

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« Le petit quizz de la Grande-Guerre », Grégoire Thonnat

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De qui s’agit-il ? 

De nos cinq arrière-grands-pères, combattants de la Grande-Guerre en France et Russie ; Abel, Ernest mort pour la France, Gaston, Fiodor et Vassilï

 

Si les taxis parisiens sont rentrés dans l’Histoire avec les « taxis de la Marne », qu’ont-ils fait qui écorne un peu le mythe ?

Ils ont mis les compteurs afin que les autorités militaires règlent la course !

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Avec « Le petit quizz de la Grande-Guerre » de Grégoire Thonnat, nous sortons évidemment de notre  contexte « récit de soldat », mais ce livre mérite un coup de projecteur, bien qu’il soit d’ores et déjà un succès de librairie (25 000 exemplaires vendus). Il est composé d’une centaine de questions/réponses sur des évènements clés, anecdotes, idées reçues... Une manière ludique d’aborder la Première Guerre Mondiale, pour un prix modique (moins de 5€). L'Education Nationale pourrait tout à fait l’utiliser dans la cadre du Centenaire... (puisque l'on parle de pédagogie innovante, passons à l'acte). 

Aux éditions Pierre de Taillac. Disponible ici. A noter, dans le même esprit et par le même auteur, le « Petit quizz de la Marine ».

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Avec Grégoire Thonnat et les éditeurs Pierre de Taillac et Nimrod, aux Invalides pour le centenaire de l’ECPAD

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« Offensive éclair au Mali », CBA Rémi Scarpa, 92e RI

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« Rapaces » de la 4e Cie du 92e RI au combat dans les rues de Gao. Photo ECPAD/Jérémy L, issue du livre.

Les « Cent jours » de l’offensive les avaient soudés ; la chaleur étouffante n’avait distingué ni les grades ni les armes d’origine ; l’ennemi, tenace et imprévisible, avait été vaincu par l’effort conjoint des combattants, ceux de l’avant, commandés par des états-majors réactifs, des logisticiens et des transmetteurs, des pilotes et des mécaniciens (…) Cette victoire des armes de la France, c’était celle de l’union, chère au cœur du Général de Monsabert  , l’union des armes, des âmes et des cœurs.

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« Offensive éclair au Mali » par le CBA Rémi Scarpa, Gaulois du 92e RI. Ouvrage qui restera comme la référence sur Serval. En premier lieu, qui aurait été plus légitime que le CBA Scarpa, assistant militaire du GAL Barrera commandant les forces terrestres, pour écrire un tel livre ? Ensuite, vous y trouverez toutes les informations sur l’organisation de la force, le déroulement de l’opération au jour le jour, les unités impliquées (avec une large place laissée au Soutien, Transmetteurs, Tringlots, Logisticiens…), le matériel employé, les alliés africains, les insignes et fanions, des plans, les hommages à ceux qui sont tombés… le tout accompagné de témoignages. En sus, des clichés *sublimes* de l’ECPAD ou issus des collections particulières de nos combattants (ce qui en fait aussi un beau livre-photo). « Et c’est pas fini… » J En bonus, un film de 55 mn réalisé par l’ECPAD.

Aux éditions Pierre de Taillac. Disponible ici.

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Avec le CBA Rémi Scarpa, Salon du Livre de Paris 2015 & Prix littéraire de l’Armée de Terre – Erwan Bergot.

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A suivre…

 

 

 

 



29/05/2015

« Task Force 32 – SAS en Afghanistan », ADJ Calvin Gautier, 1er RPIMa, autoédité.

Extraits et photos publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur. Droits réservés. Merci de nous consulter si vous souhaitez en réutiliser.

 

 

Ces hommes en ont assez vu pour développer une lucidité intérieure légèrement désabusée et sarcastique, mais ils corrigent toujours la tristesse de l’âme par une féroce rage de vivre, une joie carnassière de l’instant et vouent à l’action un culte digne de l’antique.

Sylvain Tesson

 

Ah les Forces Spéciales françaises ! Tout le monde les « connait », tout le monde en parle : de sacrés mecs, hyper pro, le top, l’élite... L’aura est légitime. Mais au fond, qu’est-ce que l’on « sait » d’eux ? Mmmm ?

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Hé bien, pas grand-chose… jusque-là... Car grâce à « Task Force 32 » de Calvin Gautier, 1er RPIMa, vous êtes invités à plonger dans la vie d’un « Stick Action Spéciale », au combat, en Afghanistan. De l’inédit ! 

Alors, évidemment, notre opérateur a reçu l’aval de ses camarades et a édulcoré son propos (sécurité oblige). Reste que l’entrainement (intensif !), la vie dans la base et ses galères (p* la Logistique !), les ordres (mais c’est n’importe quoi !), le combat (oui, ça « défouraille »), les blessés (car le Taliban n’est pas un bras cassé)… Vous retrouverez tout cela dans le livre. Mais aussi la magnifique fraternité qui règne  entre ces garçons (on ne va pas faire sourire en parlant d’amour… J) ;  Et puis de l’humour, car on rigole beaucoup  en lisant Calvin (le bar des SAS est équipé d’une « pole bar »… mais pas beaucoup de filles ; alors, qui danse ?). 

Des hommes, quoi  (fiers de se montrer des dessins d’enfants reçus de France pour les fêtes…).  

Oui, les opérateurs des FS sont des hommes comme les autres. 

En mieux.

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Briefing groupe avant le départ

Que veut exactement le haut commandement ? Juste rendre compte aux politiciens de nos ballades dans les vallées, sans faire de vagues, sans causer de pertes chez les salopards contre lesquels nous nous battons depuis dix ans ? Pour nous, c’est inacceptable, nous avons perdu des camarades dans ce conflit, alors il faut finir le boulot proprement et ne pas quitter l’Afghanistan comme des voleurs. Nous sommes là et nous comptons bien faire notre travail. 

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Jalhorel, en position

Nous devons rester vigilants, parce que des infidèles, même inutiles sur une montagne perdue, ça reste une cible de choix. Avec Laurent, nous remarquons les petites habitudes des gars du groupe et les observons avec fierté. Glissés entre les rochers et dans les creux naturels du sol, malgré la fatigue et le froid, les gars sourient et sont prêts à réagir à un éventuel contact. C’est vraiment quelque chose d’exceptionnel d’être à la tête d’une telle meute.

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Poste de combat et look snowboardeur

Un chien errant monte sur la position. Il a l’air plutôt content de se trouver de nouveau copains. Il se trouve même un superbe jouet en déterrant une de nos charges explosives. Le malheureux se promène avec un pétard de 250g dans la gueule, poursuivi par Laurent qui a bondi pour récupérer la charge. (…) «  Putain les enculés, ils ont même dressé des chiens en suicide bomber » ! 

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Opération Snake 22. Entrée du poste de Kalei-Pakistani dans lequel Jéjé, Virgil et Nigger sont blessés

Lorsque nous arrivons auprès de Jéjé, nous réalisons la gravité de la situation. Il gémit de douleur car il a des éclats de fragmentation métallique dans le visage, l’abdomen et les jambes. Sa jambe gauche est brisée au niveau du fémur et d’énormes lambeaux de chair pendent. Constant vérifie et resserre le garrot. J’essuie le sang sur le bas ventre pour mieux voir les plaies et Jéjé me demande de vérifier sa bite et ses couilles. Je lui conseille de ne pas regarder ses blessures et effectue ma vérification. Tout est là et en assez bon état (…) Constant empile les compresses sur la plaie pour arrêter les saignements et protéger la blessure. Pendant ce temps j’essaie de mesurer le pouls mais il est trop faible pour être perceptible. Jéjé a perdu une grosse quantité de sang et il est blanc comme un cul. Je le saisis en le rassurant, nos mains sont soudées par le sang coagulé. Il ne cesse de dire « Calvin, j’ai mal… ils m’ont eu ces enculés ! » « T’en fait pas Jéjé, c’est pas grave. On va te sortir de là vite fait ». Constant me demande «  Tu as le pouls ? ». Comme Jéjé me regarde, je réponds « Oui, c’est nickel. » Constant comprend en voyant ma tronche que je mens.

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Jalorhel, Bravo team en action

Le groupe gicle aussitôt pour se poster et se préparer au combat (…) A 800 mètres de notre position, six insurgés se préparent à nous engager. Je fais ouvrir le feu juste au moment où ils placent une [mitrailleuse] PKM face à nous. Les Minimis et Damien engagent l’ennemi avant qu’il ne puisse s’installer. Les insurgés courent dans tous les sens. Chris effectue des tirs de saturation dès qu’une silhouette apparait au loin (…) « RPG ! » Les insurgés tirent deux roquettes en tir courbe pour essayer de compenser la distance mais elles tombent trop court. La PKM entre à présent dans la danse en tire de petites rafales précises. Les impacts de balles claquent autour de nos positions en faisant des bruits secs et des morceaux de rochers volent en éclats. Je télémètre la distance exacte de l’emplacement de la PKM avant de l’annoncer à Damien qui effectue les corrections nécessaires. Il ouvre le feu en coup par coup rapide et quelques secondes plus tard la PKM cesse son tir.

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Tentative de Snowboarding. Pas assez de pente…

Il a neigé à nouveau (…) Avec Laurent, nous faisons une petite balade dans la base pour nous décontracter et bavarder un peu au calme. Nous réalisons quelques photographies de paysage (…) Comme nous sommes plus près de la fin de nos carrières que du début, nous ressentons le besoin d’accumuler les souvenirs (…) J’imagine facilement dans 30 ans des conversations du style : « Tu vois, avant d’être un vieux con, papy était super cool, avec ses potes ils ont fait la guerre et c’était une sacrée bande de salopards ! »

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La popote SAS de la TF32 à Tagab

Le détachement qui nous relève arrive par convoi routier. Nous les guidons jusqu’à leurs chambres puis à une soirée karaoké organisée au foyer de la base. Lilian est le poulain du groupe, tous les espoirs des SAS reposent sur lui car les autres gars du groupe chantent comme des nazes. Je dépose les fameux tickets pour la sélection des chansons et choisis judicieusement deux titres : « Comme un ouragan » de Stéphanie et « Lolita » d’Alizée…

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Photo souvenir de l’opération Buffalo 60

Les gars se rapprochent et le SAS se réunit une dernière fois pour se dire au revoir avant les permissions. Juste à côté de Virgil, je m’aperçois que Laurent a un air bizarre, le regard fixé dans le vide et les yeux humides. Cela me parait étrange. Dans les semaines qui ont suivi, j’ai réalisé que moi aussi je n’étais pas dans mon état normal. Il a fallu que je m’habitue aussi à avoir les yeux humides et à me reprendre lorsque mon regard se perdait dans le vide.

 

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Calvin.jpgDe par son appartenance aux Forces Spéciales, nous resterons discrets sur l’ADJ Calvin Gautier. Il suffit de savoir qu’il a parcouru le globe pendant vingt ans au service de la France, dont plusieurs déploiements en Afghanistan avec ses camarades du 1er RPIMa.

Il s’est forgé sa propre personnalité au cours des stages, des entraînements et des missions. Il a hérité des qualités des gens qu’il a côtoyés, qu’ils soient instructeurs ou camarades. Ils l’ont guidé sur ce chemin. Nous ne pouvons même pas imaginer les expériences qu’ils ont vécues ensemble. Je suis admirative envers chacun d’entre eux pour toutes les souffrances qu’ils ont endurées et qu’ils ont surmontées pour devenir ce qu’ils sont à présent.

Marina, compagne de Calvin.

Nos opérateurs SAS ne sont pas que des « bêtes de guerre », ils sont pétris d’humanité et elle affleure au détour du récit. Il y a ces petits gestes à l’égard des Afghans victimes du conflit ; cette complicité fraternelle entre membres du 1er RPIMa qui se retrouvent en famille ; cette connivence avec les « cousins » du 13e RDP, teintée d’estime et de respect mutuel ; ces rencontres impromptues et inoubliables avec des soldats français ou alliés, dont on partage le même sort au hasard du destin. Et puis il y a ces moments intemporels où, dans la tourmente, se forgent des amitiés éternelles, plus fortes que les liens du sang.

Souhaitons que notre patrie ait toujours des enfants animés de cet esprit d’audace et de victoire.

GAL Jacques Rosier, alias Romuald

 

Site de Calvin Gautier ici. Page FaceBook .

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ISBN : 978-86-917707-0-9 – Prix 25€ - format 23x16, 280 pages, 64 photos couleurs,  couverture rigide

Dans « Task Force 32 », Calvin Gautier ne parle pas de lui, mais du groupe, ce qui fait du livre un bel hommage à tous les opérateurs du 1er RPIMa et plus généralement aux FS. Il a été édité directement par l’auteur. Un autre challenge (et pas des moindres croyez-nous) relevé avec succès. Il est exclusivement disponible via le site de Calvin et l’association d’entraide Forces Spéciales « Fraternité et Esprit SAS ». Toutes les infos pour se le procurer sont  ici.

N’hésitez pas à contacter Calvin. Il est très pris mais sais se rendre disponible et accueil sympathique garanti !

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Hommage

Aux membres des Forces Spéciales morts pour la France en Afghanistan,

CPL Murat Yagci

CCH Cédric Crupel

ADJ Joël Gazeau

CCH David Poulain

BCH Gabriel Poirier

ADJ Yann Hertach

PM Loïc Le Page

PM Frédéric Paré

SM Jonathan Lefort

SM Benjamin Bourdet

CCH Sébastien Planelles

A tous les membres des Forces Spéciales morts pour la France, morts en service commandé,

Aux blessés.

 

Je ferai face à tout et je vaincrai.

Rien ne m’arrêtera, sauf la mort.

Et même si cela arrive, ce ne sera que temporaire,

Parce que ma mémoire motivera mes frères à triompher.

Code d’honneur de l’opérateur des Forces Spéciales.

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Un coup trop long et un coup trop court, le prochain est pour nous (…) J’étais touché (…) Je ressentais une douleur intense et je me suis injecté une dosette de morphine (…) J’ai examiné mon entrejambe parce  que je craignais d’en perdre une (…) La douleur au ventre est rapidement devenue atroce (…)

J’entendais le Tigre faire les passages et tirer autour de notre position. Là, j’ai vu Constant, l’infirmier du stick, passer pour aller voir Jéjé, car il était vraiment dans un sale état. Quand j’ai vu Calvin, l’adjoint du SAS, avec son équipe, je me suis dit que j’étais sauvé. J’en avais les larmes aux yeux rien que de les voir. Je savais qu’ils allaient se battre pour nous et nous sortir de cette merde (…) Je les voyais se déployer avec rage pour nous sauver. Je regardais ces visages tendus. Les gars n’avaient qu’un seul objectif, nous sortir de là. 

Curieusement, j’étais serein. Calvin et son équipe étaient là. Plus rien ne pouvait m’arriver.

Virgil, gravement blessé lors de l’opération « Snake 22 », 29 novembre 2011.