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02/01/2013

« Dix Semaines à Kaboul », Pr Patrick Clervoy, Service de Santé des Armées, Ed. Steinkis

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  • "Celui à qui la guerre ne fait point horreur, c'est lui, le vrai lâche."
  • Jean Simard, écrivain Québécois

 

Le Professeur Patrick Clervoy, médecin militaire, nous fait partager le journal de bord de ses dix semaines passées en 2011, au sein de l’hôpital militaire de Kaboul.

Une baffe.

 

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En guise de préambule, au risque d’être trivial, rappelons que le personnel de Santé est exposé aux mêmes risques que les autres militaires.

En Afghanistan, les véhicules ambulances ne sont pas marqués d’une croix (voire d’un croissant) rouge ; ils deviendraient dès lors la cible privilégiée des Talibans…

Peu avant l’arrivée du Pr Clervoy à Kaboul, un colonel Afghan est entré dans une salle de planification située dans la base de l’hôpital militaire, et a abattu froidement 8 américains, avant de se faire éliminer par la garde (à noter que, lors des obsèques de ce colonel, 15 000 personnes étaient présentes… ).

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photo © Ministère de la Défense/ecpad

Les médecins, infirmières et infirmiers, brancardiers-secouristes, sont des combattants, mais avant tout, ce sont  des combattants pour la Vie.

Ce ne serait pas faire honneur aux sacrifices de nos troupes que de se contenter des mots  « blessé », « amputé », « mort ». Ce sont des paravents, et, par confort moral, on ne veut surtout pas regarder ce qui se cache derrière. C’est, de notre part, une forme de lâcheté.

La lecture de « Dix Semaines à Kaboul » est donc incontournable, aussi difficile, « émotivement parlant » soit-elle.

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photo via  Theatrum Belli

Attendez-vous à être secoués, malmenés, dérangés : l’effroi dans les yeux, le corps en charpie, la  souffrance à devenir fou, le sang qui pisse, l’aorte à clamper, l’os à scier.

Oh non, Clervoy ne nous ménage pas. Il nous fracasse même un peu.

Alors, oui, on se réjouit, admiratifs de l’engagement des hommes et femmes du service de Santé : la petite fille est sauvée, le civil sort de son délire et sourit, le soldat a les clés pour se reconstruire, alors qu’il a tué d’un tir accidentel son camarade (chapitre bouleversant).

Oui. On se réjouit. Mais parfois…

 

  • Les traces de sang ont été nettoyées,
  • Les mains sont propres,
  • Le visage couleur de cire est celui d'un jeune homme aux traits fins et réguliers.
  • "Il est beau", dit l'une des personnes qui l'ont préparé.

 

Je défie quiconque de ne pas terminer certains chapitres les yeux embués (si c’était le cas, placez la main sur votre poitrine gauche. Vous vous apercevrez que vous n’avez pas de cœur).

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Hôpital Militaire International de Kaboul, photo © Ministère de la Défense

N’oublions pas que Clervoy est psychiatre. C’est donc au sortir de la salle d’opération, ou après les combats, qu’il intervient. Il est là pour prendre la main de ces filles et garçons, déboussolés, traumatisés, perdus dans un brouillard délétère. Il les fait sortir de ce brouillard, il leur désigne une petite lumière, celle indispensable à leur reconstruction psychologique.

D’une certaine façon, il applique la même démarche à nous, lecteurs : il nous prend, nous aussi, par la main, et nous aide à sortir d’une autre forme de brouillard : celui de la naïveté, des idées reçues, de l’hypocrisie, de l’égoïsme. Il nous  montre à nous aussi une petite lumière : celle qui, désormais, nous interdira de  commenter les news de cette façon : « un 5ème soldat est mort au Mali. C’est triste. Tu m’passes le sel ? ».

 

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Caporal Alexandre Van Dooren, 1er RIMa

Mort pour la France au Mali

 

  • Derrière ces mots,
  • des soldats ont perdu leur camarade,
  • des parents ont perdu leur fils,
  • une jeune-femme a perdu son compagnon,
  • une petite-fille de deux ans a perdu son papa,
  • un bébé à naître ne connaîtra jamais son papa.
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Nul homme n’est une île.Tout homme est un morceau du continent. Si une parcelle de terre est emportée par la mer, l’Europe entière en est lésée, comme s’il s’agissait de la maison de tes amis, ou la tienne propre.

La mort me diminue, car je suis solidaire du genre humain. Alors, n’envoie jamais demander : Pour qui sonne le glas ?

Il sonne pour toi. 

 

John Donne, Poète anglais (1572+1631), en introduction à « Pour qui sonne le glas », Ernest Hemingway

 

 

Merci Professeur pour votre livre. Merci pour cette baffe. Une baffe salutaire.

 

 *

 

d9c759b91b1d0a22d17b9d_L__SX80_.jpegPatrick Clervoy est né en 1958. Médecin-psychiatre (Santé-Navale), il est titulaire de la chaire de psychiatrie à l’Ecole du Val-de-Grâce, spécialiste des traumatismes psychiques, membre du groupe de travail OTAN sur le stress et le soutien psychologique. Auteur de plusieurs livres, il est déployé régulièrement en OPEX.

 

 *

 

Soutenez les éditeurs qui soutiennent nos troupes : Editions Steinkis

Je tiens à remercier tout particulièrement Ainara

 

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Clervoy - service-de-sante-des-armees.jpeg

Hommage

 

  • Au Premier-Maître Frédéric Paré, infirmier, Commando Marine, mort pour la France en Afghanistan,
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  • Au Sergent-Chef Mathieu Toinette, infirmier, 402ème RA, mort pour la France en Afghanistan,
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  • Au Caporal-Chef Rodolphe Penon, infirmier, 2ème REP, mort pour la France en Afghanistan,
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  • Aux médecins, infirmières et infirmiers, brancardiers-secouristes, sauveteurs au combat, morts pour la France,
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  • Aux blessés.
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Avec le salut fraternel du Chasseur et de la Russe-blanc au personnel de Santé, combattants de la vie.

 

"Mari transve mare, pro patria et humanitate, hominibus semper prodesse"

Sur mer et au-delà des mers, pour la Patrie et l'Humanité, toujours au service des Hommes

Devise de l'Ecole de Santé des Armées 

 

 

 

Livre, récit biographique d'un médecin militaire, Afghanistan 

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